tolérance yogaLe milieu du yoga est censé être un monde merveilleux de non-violence, de tolérance et d’amour universel.

Ça, c’est l’idée qu’on peut en avoir, de loin, avec de belles œillères et une bonne dose de naïveté.

C'est ici un article un peu personnel, dans lequel je vous partage mes réflexions pour essayer de comprendre pourquoi le milieu du yoga est devenu un champ de bataille d’égos contrariés et de bien-pensants à la tolérance discutable. Comme d’habitude sur ces sujets polémiques, la critique est la bienvenue tant qu’elle est intelligente et constructive et le débat peut se faire avec respect pour les personnes qui ont un avis contraire…

Version audio de cet article

J'ai écrit l'article sur la base de ce podcast, enregistré de façon plus spontanée. Si vous avez la flemme de lire, le contenu du podcast est à peu près similaire 🙂

 

Les controverses dans le milieu du yoga

Le yoga est-il une discipline spirituelle ou physique ?

Au bord du Gange, Varanasi

Je commence par ça parce que c'est ridicule, ça revient souvent et c'est facile à déboîter, alors allons-y gaiement !

Rien que la question est bête. Est-ce bien nécessaire de définir yoga ? Cette discipline qui vise à faire exploser le définitions, les concepts, qui nous pousse à aller au-delà des mots, à nous relier un peu plus au cœur et un peu moins à l'intellect ?

Les partisans d'un yoga purement physique vont rejeter tout ce qui ne concerne pas le corps. On dira que cela ne sert à rien de méditer, la pratique de postures intenses permet de centrer son attention. Certes, mais pas de la même façon.

On dira que le plus important est l'alignement, la justesse du placement du corps (par rapport à quelles références ?).

Les traités de yoga mentionnent uniquement les postures assises pour les plus anciens.

Ensuite, plus les siècles passent, plus de nouvelles postures paraissent. Est-ce pour répondre aux besoins 'une société de plus en plus sédentaire et stressée ? Je ne sais pas. Toujours est-il que cela évolue.

Si la posture a toujours occupé une place dans les manuels de hatha yoga, elle est aussi considérée comme une étape transitoire, un marchepied vers la maîtrise du souffle et du mental. Pour autant, doit-on délaisser le corps ?

Les partisans d'un yoga purement énergétique (ça veut dire quoi, déjà ?) vont mépriser ceux qui parlent de posture ou qui vont se centrer sur le corps. Ces mêmes personnes vont d'ailleurs bien souvent proposer des cours dans lesquels ils pratiquent des postures, se préoccuper de la pureté de leur corps et à l'occasion aller voir un kiné ou un ostéo pour remettre deux-trois vertèbres en place.

Ils auront l'air malin si le kiné leur répond qu'il ne s'occupe pas de ces questions corporelles, que ce qui compte ce n'est que l'énergie... Ou que c'est dans leur tête. Soyons sérieux deux minutes. Le corps est important, c'est notre outil pour traverser la vie et il est indéniable que tout dysfonctionnement du corps aura un impact au niveau mental.

Parfois aux niveaux émotionnels ou hormonaux, on ne peut donc pas dire que c'est anodin.

Le hatha yoga ne se pratique pas sans le corps : même s'il ne s'agit que de posture assise, il y a une posture.

Rejeter ces considérations physiques est dommage. Autant faire les choses bien et prendre soin de cet outil précieux. Même si on peut changer quelques pièces, ce n'est jamais bien agréable.

Je note que souvent ce rejet du physique vient d'une méconnaissance en anatomie, et c'est une manière de justifier ces lacunes. On ne peut pas être bon partout ! Rien de grave, tant qu'on fait preuve d'humilité et que l'on s'efforce de prendre les précautions nécessaires si l'on enseigne.

Ensuite, certains enseignants véhiculent cela : le corps, on s'en fout, c'est l'énergie qui compte. Allez dire ça au type qui ne peut plus bouger sa nuque après une demi-heure de shirshasana. On peut avoir des convictions pour soi et faire preuve d'intelligence et d'empathie dans l'enseignement.

Pratique au bord du Gange, Varanasi, Inde

Enfin, je ne peux pas m'empêcher de penser que cette détestation du corps n'est finalement rien de plus que le fruit de quelques siècles d'une tradition religieuse où le corps était méprisé et l'âme considérée comme pure. Une drôle de séparation qui ne fait, je crois, pas très bon ménage avec le yoga.

Pour comprendre ce qu'est le yoga, il faudrait pouvoir nous défaire de nos idées préconçues et des traces inconscientes laissées par une éducation et un contexte culturel bien éloignés de l'Inde d'il y a 2000 ans. Soyons clairs, ce n'est pas possible. Par conséquent, il y aura toujours des incompréhension, chez vous, chez moi, chez tout le monde. Ceux qui prétendent le contraire sont soit fous, soit bouchés, soit totalement incapables d'admettre leurs limites, et dans ce dernier cas je crois que c'est vraiment dangereux.

Réduire le yoga à une technique, c'est regarder le doigt quand le sage montre la lune. C'est passer à côté de l'essentiel, qui n'a rien à voir avec le faire. Le choix d'une technique ou d'une autre est une étape. Nous n'en sommes pas tous à la même étape et nous avons certainement besoin de tous prendre des chemins différents...

Mon type de yoga est MIEUX que le tien, d’abord !

Tous comme les politiciens, les religieux et les gosses dans la cour de récré se tirent la bourre pour savoir qui est le meilleur, les yogi font un concours de yoguitude et chacun est persuadé que sa vision est la meilleure.

Chacun a raison, bien sûr. Chacun prend ce qui lui convient le mieux.

On choisit ce qui faits sens pour soi, donc oui, le type de yoga dans lequel on s'engage est le meilleur POUR SOI, à cet instant T. Demain, peut-être qu'il en sera autrement.

Bastons anatomiques dans le milieu du yoga

N'étant pas du côté des pros de l'anatomie, je ne suis ces débats que de très loin, d'un air lassé. Un peu comme les enfants qui s'ennuient à table quand les adultes parlent.

Je pensais naïvement que l'anatomie était une discipline très carrée, scientifique, donc avec une vérité et que cette vérité n'étaient plus discutée une fois établie.

Bon, c'est faux, pour certains points en tout cas il reste visiblement de nombreux points à éclaircir.

N'étant pas une spécialiste, je ne peux que conseiller à chacun, s'il souhaite rentrer dans ces débats, de se former et de confronter mes points de vue, d'éclairer ses convictions à la lumière des dernières études et recherches menées, et aussi de garder une sensibilité dans le corps. un corps c'est un truc vivant, vous savez, pas seulement une planche dessinée ou un cadavre découpé. ça bouge, ça vit, ça envoie des signaux...

C’était mieux avant…

sadhu yoga

Nul besoin de se déguiser en yogi pour pratiquer le yoga... A moins que l'habit (ou l'absence d'habit) ne fasse le moine (ou le sadhu) ?

Alors là, mea culpa, c'est ma phrase préférée.

Je m'inclus complètement dans les vieux réacs qui sont intimement convaincus qu'avant, tout était mieux, qui ont ce fantasme d'une monde où régnaient l'ordre et la justice, l'harmonie, où les licornes gambadaient dans les champs et où les hommes vivaient en paix.

Je sais que c'est du rêve.

Mais ce rêve est tenace et cela reste un idéal même si je sais que ce n'est pas l'image fidèle d'un passé trop vite passé.

Il y a cette tendance chez beaucoup de yogi issus de courants "traditionnels", dans le sens où ils s'inscrivent dans une lignée, une transmission, une école, à penser que la sagesse ancestrale des vieux yogi vaut mieux que tout enseignement moderne.

La date d'un texte fait foi alors, plus il est périmé plus il a de la valeur, c'est un super vin qui ne vieillit jamais trop. Bon.

Je pense qu'il y a une part de vérité : avec l'essor des moyens de communication, tout le monde (moi y compris, vous n'avez qu'à voir cet article) est pris de diarrhée verbale ou littéraire. Le papier ne coûte plus très cher (pour le moment) donc on peut imprimer d'infâmes torchons qui n'auraient jamais mérité une feuille A4 un siècle plus tôt.

Comment s'y retrouver dans ce fouillis ? Comment ne pas penser qu'à une époque où la communication était limitée elle n'était pas plus qualitative ? Il faut aussi prendre en compte qu'avant, dans cet avant où tout était mieux, l'accès à la connaissance était limité. Donc le savoir et l'esprit critique étaient certainement moins développés qu'aujourd'hui.

Tu n’es pas (aussi) légitime (que moi)yogi cendres

Moi, j'ai étudié le yoga durant 15 ans. J'ai eu des maîtres renommés. Je fais 2 heures de méditation chaque jour. Et je suis végétarienne. Donc je suis nécessairement plus légitime que toi à enseigner.

Moi, j'étudie depuis 30 ans, j'ai fait une retraite de 3 ans dans l'Himalaya. J'apprends le sanskrit.  Et je suis vegan.

Moi, je pratique depuis 50 ans, j'ai vécu 10 ans en Inde auprès de mon maître Swami chépaquoinanda. Je parle couramment le sanskrit, j'ai étudié les textes auprès des plus grands. Et je me suis affranchie du besoin de nourriture.

Moi, je ne me définis plus par mes réalisations. Je suis simplement libre de toute définition.

Vous voyez l'absurdité du truc ?

Si l'on se compare et que l'on essaie de se placer sur l'échelle de valeurs dans le monde mondain yoguique, il y aura toujours des personnes à mépriser et d'autres à aduler. Foutons l'échelle au feu !!!

Tous les profs de yoga sont des voleurs (et les guru, des charlatans)

groupe yoga inde

Toujours au bord du Gange ! Pratique de yoga matinale

L'enseignement du yoga devrait être gratuit. C'est souvent ce que l'on entend. Tous ceux qui demandent de l'argent sont des voleurs.

J'aimerais bien que ce soit le cas. Mais je ne sais sincèrement pas comment faire. Comment se dédier pleinement à l'enseignement sans être rémunéré ? On peut mettre en place des stratégies pour générer des revenus passifs, et se dégager du temps pour enseigner. Enfin, tout cela demande du travail.

Je note quelques petites choses :

  • Pour la plupart des gens, ce qui est gratuit n'a pas de valeur, faire payer l'enseignement est une manière assez efficace de s'assurer de l'engagement des élèves.
  • Prendre des cours ne sert qu'à entretenir une motivation. Quelques techniques simplissimes pratiquées avec assiduité sont aussi efficaces que des méditations de plus en plus complexes... Donc personne n'est obligé de payer, les pratiques de base sont très accessibles, et "de base" ne veut pas dire "au rabais".
  • Si c'était mieux avant, l'enseignement du yoga a toujours fait l'objet d'une contrepartie. Dans notre société, en Europe, aujourd'hui, la seule façon de s'assurer une contrepartie juste est de demander de l'argent. D'eux-mêmes, les gens ne donneront que rarement en fonction de la valeur de ce qu'ils ont reçu.

La sacro-sainte tradition

yoga om

Sur les ghats, Varanasi

La lignée de Bidule Rinpoché, Swami machin ou de Trucmuchnath (ya pas de jaloux, je tape même sur mon propre camp !) a dit ça, alors on fait ça, et donc c'est la seule chose à faire.

Certes, les traditions ont un sens. Accepter cela et leur reconnaître une valeur n'empêche pas de remettre les choses dans un contexte et de développer son esprit critique.

Certes les traités de hatha yoga ne parlent pas de physiologie. Ils décrivent cependant des postures.

Il est également admis que ces traités ne sont que des guides, des aide-mémoire, et ne peuvent pas suffire à apprendre le yoga.

La pratique sera transmise de maître à disciple. À moins d'être le disciple, qui peut prétendre savoir de façon certaine ce qui est compris dans cette transmission ?

D'une époque à l'autre, les savoirs évoluent. Les yogi d'antan ne rejetteraient peut-être pas les éléments de compréhension actuels.

Peut-être ne sont-ils pas tous en contradiction avec la tradition... Nos modes de vie ont évolué depuis 2000 ans. Et il faut garder en tête que nous ne sommes pas indiens (enfin, c'est valable pour 98% des gens qui liront ce texte peut-être).

Les textes s'inscrivent dans un contexte culturel et dans une époque. Aujourd'hui, le quotidien est bien différent de celui d'un indien du premier siècle. Il est peut-être sage de prendre ces petites différences en compte et de ne pas confondre tradition et rigidité sous peine de ne plus être vraiment... Dans le yoga.

Peut-on mettre fin à ces débats dans le milieu du yoga ?

Et si on revenait à ce qu’est le yoga pour avancer dans le débat ? Trouvons ici quelques éléments qui permettraient de mettre fin aux disputes stériles pour aller vers des réflexions constructives. En revenant à ces principes issus eux-mêmes des enseignements du yoga, je pose ici quelques pierres pour construire un espace sain, agréable pour tous, afin de nourrir les échanges intelligents, cordiaux et apaisés. Le monde des bisounours, quoi…

Définir le yoga, une clef pour couper court aux débats stériles ?

On pourrait s'amuser à définir le yoga. Comme ça, plus de débat ! Pas si simple.

Chaque texte, chaque maître pourrait avoir sa définition. Et beaucoup n'ont même pas cherché à le définir.

La plupart des yogi actuels se réfèrent aux Yoga sutra de Patanjali en disant que "le yoga c'est la cessation des fluctuations du mental".

Bon, admettons. Peut-être que cette traduction n'est pas la plus heureuse. Je suis personnellement séduite par la proposition de Pankaj Saini qui propose "Yoga est la dissolution des vritti dans leur cause" et passe ensuite un long moment à définir ce qu'est un vritti. Vouloir une réponse ferme et définitive n'aidera pas, mais se poser la question est intéressant.

Le monde, ma construction mentale

femme assise méditationCe qui est vrai dans mon monde n'est pas forcément vrai dans celui du voisin.

Je trouve que la tartiflette est une véritable atteinte au bien-être de mes narines sensibles et qu'il faudrait l'interdire, mais elle fait le délice des papilles de mon voisin. Qui détient la vérité ? Est-ce important de trancher ?

Le monde que l'on croit voir de façon objective est passé par les filtres de nos souvenirs, préférences, conditionnements, expériences passées...

Vouloir imposer à tous sa vision du monde c'est être un petit dictateur.

Souvent, les personnes qui prônent la tolérance et crient bien fort qu'il faut être gentil et conciliant sont les premières à se braquer lorsque quelqu'un a un avis contraire.

Pourquoi dans le milieu du yoga qui est censé être un peu évolué (ou au moins rempli de gens qui se posent des questions) l'intolérance est-elle encore plus forte que dans bien des milieux moins "spirituels" ?

Peut-être parce que l'on touche au sens et à "l'amélioration de soi" (même si je ne suis pas certaine que ce soit le but final de la pratique...). Il est facile de prendre les enseignements pour les "détourner" et les mettre au service d'un égo blessé au lieu de développer l'ouverture et le discernement.

Je crois aussi que quel que soit le milieu, dès que des personnes atteignent un certain niveau de connaissance, ces petites batailles ont lieu. Bien souvent, ceux qui sont dans ces guéguerres n'ont tout simplement pas encore perçu l'étendue de leur ignorance. Plus on avance, plus on sait... Qu'on ne sait pas. 

Tous les points de vue se valent-ils ?

Là aussi c'est un sujet qui n'est pas simple. J'ai envie de dire que oui, mais je comprends ceux qui disent l'inverse.

C'est un sujet que nous abordons souvent avec mon cher-et-tendre-presque-yogi. De mon côté, je laisse tout le monde s'exprimer, et si je ne suis pas d'accord ou si j'en ai marre, j'écris un article pour râler.

Lui, il trouve que certaines choses sont inacceptables et qu'il faut poser des limites.

Il pense par exemple que certaines idées politiques extrêmes ne devraient pas avoir d'espace public d'expression. Moi je crois que si. Bon, on ne cherche pas se convaincre. Les deux points de vue existent, et chacun a le droit d'avoir le sien.

Ça, vous l'avez compris... C'est mon point de vue !

Avoir un comportement juste

offrande gangeVous avez remarqué, ce site s’appelle DHARMA Lyon.

Lyon, ben, parce qu’au moment où je l’ai créé j’étais à Lyon. Et dharma parce que j’ai une obsession pour ce qui est juste. Mais comment définir ce qui est juste ?

Si c’était simple et mécanique, on déléguerait la justice à ChatGPT et on pourrait désengorger les tribunaux.

Le yogi est obsédé par le dharma, mais on ne parle pas ici du respect des lois dictées par un Etat qui s’inscrit inévitablement dans une époque et une pensée. Agir selon le dharma c’est faire ce qui semble juste.

Quel est l'outil de mesure ? La conscience. Pas ce que l’on préfère, pas ce que le voisin a fait. On pourrait dire vulgairement qu’une bonne manière d’agir serait de toujours être au clair, profondément, avec ce que l’on fait, dit et pense. Vous voyez à quel point c’est compliqué ?

Nous n’avons pas conscience de toutes les forces qui nous animent, de tous les conditionnements qui amènent à prendre une décision plutôt qu’une autre. Un esprit clair et parfaitement conscient prendra des décisions, nous en prendrons d’autres.

Tous les allumés de services qui se prétendent éveillés et essaient d’imposer leurs décisions, car elles sont soi-disant parfaites, et vont évidemment tenter de brandir la carte moksha comme un joker pour justifier les pires aberrations.

Bon, soyons concrets, comment avoir un comportement juste ? Il faut déjà le vouloir, accepter que nous soyons « imparfaits » dans le sens où nous ne correspondons pas à nos propres idéaux. Nous avons des biais, une histoire personnelle, des conditionnements. Alors un peu de recul, un tout petit pas de côté est toujours salutaire avant d’entrer dans l’arène du débat yoguique.

Le yoga, une pratique personnelle

On pourrait tout aussi bien clore le débat en affirmant que la manière de pratiquer le yoga ne concerne que soi. Par conséquent, il n’y a pas à débattre : chacun fait bien ce qu’il veut tant que ça ne consiste pas à tuer des gens ou nuire à la société d’une manière ou d’une autre. Je suis assez d’accord avec cela, personnellement, mais ce sont mes biais personnels. Certains disent que c’est lâche, d’autres que c’est un manque d’engagement, ou même de la paresse intellectuelle. Moui, un peu. C’est aussi un manque de goût pour les débats. Mais vous voyez, je combats cela en écrivant ce pavé. Parce que mon dharma me souffle que c’est la chose à faire, même si j’aurais préféré passer mon samedi soir à boire des mojitos (ouais, je bois des mojitos avec du vrai rhum dedans, dans un crâne humain, en faisant des rituels à kali avec un groupe d’adeptes fous, sanguinaires et drogués).

Est-il nécessaire de parler du yoga et d’évaluer les pratiques ?

méditation gangeAvez-vous remarqué ? Nous avons un temps et une énergie limités.

Si ce temps est dédié à l’apprentissage, et éventuellement à l’enseignement si vous êtes prof, si vous y mettez tout votre cœur, il ne reste plus vraiment d’espace pour aller espionner les petits copains et dénigrer.

Plus de place pour laisser des commentaires désobligeants voir carrément dégueulasses sous des articles et vidéos que des gens ont mis des heures ou des jours à créer pour partager ce qui leur semblait juste (oui oui je fais référence à ce que je vois de plus en plus, malheureusement).

Moi aussi, je suis atterrée parfois devant certains contenus. Et je me dis aussi que ça parle à certaines personnes, alors voilà.

Je n’aime pas, et alors ? Est-ce nécessaire d’étaler nos préférences ? Sommes-nous importants à ce point ? 

Parfois j'ai l'honnêteté de dire que c'est de la jalousie : machin réussit et a une notoriété de folie, alors que je trouve les contenus proposés basiques. Bon, c'est comme ça, je suis nulle en com et je ne fais rien pour changer, donc c'est normal.

Le contenu débutant et prêt-à-consommer a plus de public que les tartines de 10 pages qui obligent à réfléchir.

Je ne suis pas top modèle et je ne peux pas blairer les réseaux sociaux, c'est comme ça, donc j'accepte que ce manque de réussite soit la conséquence directe de ces faiblesses.

Éventuellement je vais râler dans mon coin, vous savez, j'ai cette tendance "vieille grand-mère anglaise conservatrice" qui dit "c'était mieux avant" dès que quelque chose ne lui plaît pas !

[BONUS] Pourquoi ai-je écrit cet article ?

posture lotus yoga padmasana

Quand je monde m'agace, je fais comme les enfants. Je ferme les yeux et ... Pouf ! Il disparaît. Et je deviens invisible, aussi. Enfin je crois.

J’ai repris en juillet 2022 la gestion de la revue Infos Yoga, revue spécialisée sur le yoga.

Je n’ai pas le droit de faire de statistiques, mais à vue de nez on a 70% des lecteurs qui enseignent le yoga, aucun débutant complet ne lit Infos Yoga. J’ai à cœur de rendre la revue plus accessible, donc les choses changent doucement…

Bref, je me retrouve soudainement exposée à des lecteurs (et aussi des auteurs…) qui ont leurs petites habitudes depuis 25 ans. J’arrive, et je change des trucs. Minimes, mais quand même. Et là, c’est le drame.

J’avais bien compris qu’on n’était pas dans le monde des bisounours. 99% des messages sont adorables, il faut le souligner. Mais les 1% non adorables sont sacrément gratinés. Lettres d’insultes pour les auteurs, messages désobligeants, appels (oui, oui, ils appellent carrément ces gens-là) de personnes super énervées parce qu’un bouton a changé sur le site… Hé, relax. Parfois j’ai envie de leur conseiller de se mettre au yoga.

On peut tout gérer dans la bonne humeur. Quand on n’est pas d’accord, au lieu d’incendier un auteur, on peut se demander pourquoi cet agacement monte, quelles croyances et certitudes cela remet en question. On peut proposer un article pour donner son point de vue de façon constructive et apaisée au lieu de dénigrer des gens qui font un travail sérieux avec tout leur cœur.

On peut être dans le dialogue et pas dans l’affrontement, et on peut aussi apprendre que, passé l’âge de 7 ans, dit âge de raison, toute compulsion ou réaction n’a pas nécessairement à être partagée. Le recul, mes amis, le recul ! Ya que ça de vrai.

 

 

Donc voilà, cet article est un peu mon coup de gueule à toutes ces personnes qui ne font à travers leurs commentaires haineux, inappropriés ou simplement bêtes qu’étaler au grand jour leur incompréhension des enseignements du yoga et leur incapacité à se maîtriser.

Et c’est aussi un message à celles et ceux qui subissent ces attaques : vous n’avez pas à vous flageller pour quelques paroles agressives, quelques caprices de gosses frustrés ou de guru autoproclamés. Il n’existe pas d’instrument pour mesurer le niveau d’éveil, mais l’humour, l’ouverture et le recul semblent être des indicateurs assez fiables. Il n’y a qu’à lire les maîtres.

Une conclusion qui n’est pas une fin

J’ai eu la chance d’apprendre le yoga dans un espace où il ressemblait à un jeu d’enfant.

Non parce qu’il était facile, mais parce que la rigueur et la technique n’ôtaient rien à la joie des personnes qui pratiquaient.

J’ai ensuite découvert d’autres enseignants, d’autres espaces, et bien souvent la joie s’est estompée pour laisser place à une érudition teintée de suffisance, ou a un gros n’importe quoi justifié par idéologies fantaisistes ou de drôles de mélanges entre disciplines qui n’avaient plus rien à voir avec le yoga.

Je garde en tête une chose : il est indispensable d’avoir du recul et de l’humour pour s’aventurer sur cette voie. Le sérieux n’est pas de l’austérité, la connaissance n’est pas une croisade contre ceux qui pensent différemment.

Chacun suit sa voie, chaque chemin est légèrement différent. Comme on dit aux gosses, regarde ton assiette au lieu de loucher sur celle du voisin. J’ajouterai qu’il n’est pas nécessaire de signaler au voisin ce qu’il doit manger ou ce dont il doit s’abstenir, il est assez grand pour gérer ça tout seul. Ce qui n’empêche pas de partager de délicieux repas, chacun savourant un plat légèrement différent.