Bientôt une collaboration entre yogis et scientifiques ? Il y a des milliers d'années, les yogis ont pressenti le lien entre la respiration et l'activité mentale que nous attelons aujourd'hui à prouver de manière scientifique. Il est grand temps de réconcilier ces deux mondes et c'est là le but des voies non duelles. Pour que la raison et l'intuition ne s'opposent pas, pour que la science et la spiritualité puissent s'aider l'une l'autre.

Le professeur de Neurologie Jay Gottfried a publié une étude fort intéressante dans le Journal of Neuroscience, un rapport qui devrait avoir toute l'attention des adeptes du pranayama. Il étudie deux phénomènes : la différence entre les zones du cerveau activées lors de l'inspiration et lors de l'expiration et s'il y a une différence dans ces zones actives lorsque l'on inspire par le nez ou par la bouche.

Inspirer et expirer, prendre et donner

Ce que dit la science

Lors de l'étude, les scientifiques ont constaté que les personnes testées avait plus de facilité à identifier l'expression de peur sur un visage lorsqu'ils inspiraient que lorsqu'ils expiraient. La mémoire est également plus vive et plus efficace lors de l'inspiration. La vigilance est donc supérieure lorsque l'on inspire. On constate cependant que cet effet disparaît si l'inspiration se fait par la bouche…

L’approche du yoga

Dans le yoga, l'attention est souvent mise sur le temps de l'expiration. Dans la plupart des exercices de pranayama c'est l'expiration qui est censée durer le plus longtemps.

Sur l'inspiration on prend, sur l'expiration on donne. Le yogi va chercher à donner car il est dans une logique d'expérience du vide. Il ne cherche pas à se développer mais au contraire à disparaitre (à faire disparaitre l'ego qui voile et qui limite).

De manière plus pragmatique, l'expiration est souvent associée au relâchement, c'est pour cela que l'on expire au moins deux fois plus longtemps que l'on inspire dans la plupart des souffles. Sans parler du kapalabhati où le temps de l'inspiration n'est réduit qu'au strict minimum pour ne pas s'asphyxier 😀

Lors de l'inspiration les neurones du cortex olfactif, de l'amygdale et de l'hippocampe, sont stimulés. Tout le système limbique est alors activé. Le système limbique est parfois appelé le cerveau émotionnel : c'est lui qui entre en jeu lorsque l'on ressent de la peur ou de l'agressivité, mais aussi du plaisir. Une information intéressante lorsque l'on sait que l'état recherché par les yogis mais aussi par les pratiquants de nombreuses voies spirituelles est non pas un état de bonheur permanent mais un état de non-souffrance dans lequel la dualité plaisir-souffrance disparaîtrait…

On constate aussi que l'un des rares souffles où l'inspiration est bien plus longue que l'inspiration, shitali (respiration rafraîchissante) propose une inspiration par la bouche et non par le nez ! Cet exercice de respiration aux vertus calmantes serait donc la preuve que les yogis avaient déduit les mêmes choses que les scientifiques : pour être détendu mieux vaut expirer qu'inspirer, ou alors inspirer par la bouche !

L’activité du cerveau est modifiée par la respiration

Conclusions scientifiques

Les émotions, la mémoire et l'odorat sont plus forts lorsque l'on inspire que sur le temps de l'expiration. L'étude met également en évidence le fait qu'une respiration rapide peut permettre de réagir plus efficacement en cas de stress, mais qu'elle engendre elle-même un stress supplémentaire sur le long terme. Lorsque l'on respire de manière consciente, lors de l'inspiration, c'est un peu comme si l'on apprenait à apprivoiser les fluctuations du mental grâce au système limbique.

L’approche du yoga

On considère dans la pratique du yoga que le moyen d'accès privilégié au mental est la respiration. Cette intuition est aujourd'hui vérifiée. En augmentant le temps de l'inspiration on peut accroître sa vigilance en cas de besoin, et si à l'inverse on souhaite expérimenter un certain relâchement mieux vaut allonger le temps de l'expiration ou inspirer par la bouche. Via le souffle, il est donc possible d'agir sur ses émotions et donc sur son mental.